Présences Futures – Quelques réflexions sur une exposition en collectif


VESTIGES ARTIFICIELS,  Arsène Prat, 2022, Photo : Pauline Montagne

Il y a maintenant deux ans, en Décembre 2020, j’ai travaillé pour la première fois avec trois jeunes artistes. Antonin Dony, Eve Martin et Arsène Prat s’étaient rencontrés et avaient créé lors de leurs études à Poitiers, le Capsule Collectif, en 2016 avec d’autres membres qui ne les ont pas suivis à Paris. Je venais de terminer quelques mois auparavant un master en Design, Art, Média, à la Sorbonne. Ami avec Eve depuis le lycée, que nous avions fait ensemble et en ayant croisé Arsène et Antonin à plusieurs reprises, ça a été d’abord ou peut-être en même temps, une rencontre amicale. 

Nous avons préparé ensemble une exposition. Cette perspective durant la période de pandémie a eu une saveur particulière. Nous avons profité de la salle d’exposition inoccupée au 6b, lieu de résidence d’artistes à Saint Denis, où nous avons toujours notre atelier commun, pour créer une exposition. Inaccessible au public, nous avons alors décidé de transposer l’exposition en film. 

C’est avec ce premier projet que nous avons commencé, à collaborer, puis un projet en entraînant un autre, j’ai intégré pleinement le groupe. Au moment où je les ai rejoint, les activités de Capsule s’étaient presque arrêtées, chacun travaillant sur ses propres recherches. Mon arrivée et cette exposition et film ont relancé le groupe. Notre travail et les circonstances nous ont permis de poursuivre jusqu’à maintenant. Nous avons participé depuis à une dizaine d’expositions ensemble, sans compter notre travail de commande. 

Chacun a une spécialité propre, qui est mise au profit du groupe, même si la vidéo et les installations sont au cœur de notre pratique. Antonin Dony travaille dans nos expositions sur des vidéos, misent en sculpture et installé, souvent de manière figurative. Arsène Prat est sculpteur. Il a une pratique de la vidéo plus abstraite et presque systématiquement associée à des objets, ainsi qu’un intérêt de plus en plus fort pour la création sonore. Eve Martin est photographe et travaille principalement ce médium au sein de nos installations. Pour elle, les photos ne sont jamais simplement accrochées, mais sont retravaillées, découpées, augmentées pour devenir des éléments d’installations. Pour ma part, je m’occupe principalement des parties écrites et du récit que construisent nos œuvres et installations communes.

Être le seul à ne pas avoir de pratique plastique à proprement parler me donne une position plus détachée sur nos créations. Je suis bien présent à chacune des expositions, je participe aux montages, à la direction artistique et à l’élaboration théorique de notre travail. Je suis présent de la création à l’achèvement d’un projet. Je m’occupe également d’une grande partie du graphisme que nécessite le collectif, aux côtés d’Eve Martin.

Cependant, même si je peux décrire ici les positions de chacun d’une manière aussi découpée, chacun participe aussi plus ou moins à de nombreuses tâches communes. L’organisation en collectif s’est d’abord faite pour des raisons techniques et matérielles. Rassemblée autour de la vidéo, cette pratique demande des moyens et compétences variées. La mise en commun du matériel et des savoirs de chacun a permis de créer nos premières expositions. Maintenant encore, le collectif permet de multiplier notre force de travail et de se répartir les tâches, des plus administratives aux plus créatives afin de mener plus de projets avec plus d’ampleur.

 

PRÉSENCES FUTURES, Capsule Collectif, Vue d’exposition. Photo : Blaise Adilon

Le 3 décembre 2022, ouvrait à Vienne, au Centre d’Art Contemporain dit Halle des Bouchers, dans l’Isère, notre exposition Présence Future. Il s’agit pour nous d’un événement important. Notre première dans un centre d’art. L’espace est grand, de larges piliers parcourent la salle, le plafond est voûté. Une seule vitrine permet à la lumière naturelle d’entrer dans le lieu. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une ancienne halle maintenant bâtiment historique classé.

À cette destination,  j’ai rédigé le texte suivant :

” Présences futures

I.

 Nous nous souvenons d’un futur que nous n’avons pas vécu et que nous n’attendons plus. L’avenir brillant qui nous semblait promis nous hante. Nous figurons maintenant le globe débarrassé de l’espèce humaine. La Terre est marquée irrémédiablement. Les aménagements ont façonné les paysages. Nous avons pensé comprendre notre évolution quand nous n’avons qu’initié un nouveau départ. Nos traces sont permanentes.

Demain, des plantes continueront de pousser sur les ruines que nous aurons laissées. L’électronique clignotera encore. Les câbles et les lianes se confondront. Au bout de ces branches apparaîtront de nouveaux fruits d’écrans. Leurs lumières illumineront les alentours et attireront les insectes. Marqués par nos dépôts d’aciers et nos produits chimiques, ils seront composés de morceaux de circuits électroniques, de plastique et de calcaire. Le sable sera constitué de ciment, élimé par les eaux. Sortis de leur lit, les fleuves auront érodé les bâtiments. Roche, pierre et débris se mêleront au fond des cours d’eau. Sur les plages, les restes des équipements militaires s’orneront de coquillages. Les rectangles des bunkers se heurteront aux dunes de la plage et se noieront dans l’eau qui monte. Le métal rouillera et se stratifiera dans le marbre blanc. Organique, technique et géologique s’allieront.

II.

Nous imaginons ce monde, à l’abri derrière nos vitres tactiles. En même temps rassurés et inquiets. Une nouvelle beauté émerge de nos vestiges, une évolution de température, des espèces, et de toute notre biosphère. Une majorité d’entre nous attend. Les graphiques annonciateurs s’accomplissent un peu plus tous les jours. Pourtant leur rythme est si lent et les images qui défilent sont si rapides. Les nouvelles s’abattent chaque jour. Le fil s’actualise en permanence. C’est peut-être pris dans ce paradoxe que nous sommes comme une biche dans les phares d’une voiture. Nous imaginons ce monde abrité dans l’exposition. L’histoire de demain est l’histoire de maintenant. Nous cherchons à retrouver les sensations procurées par les écrans. Nos sens engourdis par la dopamine, nous percevons notre milieu différemment. L’hyperattention partout et nulle part à la fois. La matérialité des histoires qui s’écrivent dans nos œuvres. La fiction est le fond sur lequel se détachent nos figures.

Les applications et les logiciels accumulent en nous des strates d’informations, des nouvelles alarmantes autant que quelques phrases d’une musique entêtante. Que peuvent encore les représentations ? Comment rendre palpables ces figures évanescentes ? Notre monde propre, dont nous humains faisons l’expérience, est maintenant saturé, pour ne plus rien signifier.

III.

Demain, nous répondrons par l’abstraction. Les images se réaliseront, une nouvelle science et une nouvelle fiction engendreront une nouvelle biosphère. Habitée par le vivant sans humain pour parasiter ces nouveaux développements, notre espèce n’aura apporté que le terreau de ces prochaines métamorphoses. Les signaux qu’émettent et reçoivent chaque végétal et animal dépendent de leur milieu. Entourées des restes d’électroniques et mécaniques, les plantes se développeront attirées par la lumière des projections. Elles pousseront en direction des cristaux liquides, attirées par la chaleur des ventilateurs qui tourneront encore.

Le monde prendra un sens nouveau, celui que lui donnera le vivant en notre absence. Les indices que laisseront les habitants de la terre seront pour nous sibyllins. Ils feront sens pour ceux qui auront survécu, animaux, plantes, insectes, roches et rivières. Ils grandiront et se déploieront librement. Ils offriront au monde une nouvelle lecture.”

PRÉSENCES FUTURES, Capsule Collectif, Vue d’exposition. Photo : Pauline Montagne

Ce texte a été écrit, après l’achèvement de deux autres propositions, que nous n’avons pas retenues. J’ai d’abord écrit un premier texte narratif, qui établissait uniquement une sorte de contexte et du point de vue d’un narrateur au sein de celui-ci, et dans lequel pouvaient prendre place les œuvres. Contrairement à certains de nos projets où le texte se construit en même temps que les œuvres, ici, nous connaissions déjà ce que nous allions montrer. Nous avions aussi choisi le titre. Mon écrit devait initialement servir à accompagner la publication qui accompagnait Présences Futures. J’ai rédigé alors ce qui me semblait expliquer et prolonger nos installations, une histoire qu’elle rencontrait. En voici un extrait : 

Recroquevillé dans l’alcôve qui lui offrait une certaine protection, il pouvait encore voyager au travers de l’appareil qu’il tenait entre les mains. Son pouce glissait sur l’écran, et il était transporté vers les vallées perdues, dont il ne savait pas si elles avaient vraiment existé. Le vert si puissant qui se reflétait sur son visage, et éclairait la pierre dans son dos, ne pouvait s’être trouvé quelque part. Ailleurs qu’entre les pixels, ces points de lumières ensembles créaient les lieux où il se plongeait pour oublier celui dans lequel il se sentait enfermé. Il pouvait contempler cet extérieur qui ne lui était plus accessible. La plaine s’étendait jusqu’à l’horizon. Le parterre vert, entre l’herbe ou le gazon, n’avait rien de naturel. Aucun nuage ne venait troubler le ciel trop bleu. D’un glissement de doigt sur la vitre, il pouvait alors être transporté sur un nouveau site. Il accédait à toutes les parties du monde sans avoir besoin de se déplacer. Il était maintenant aux Philippines. Il croyait reconnaître cette forêt. De la même manière qu’il aurait pu être ici ou ailleurs. Mais ici, les chiffres qui s’affichaient dans le coin inférieur droit de son écran devaient indiquer une localisation précise. Tout comme il pouvait sauter d’une date à l’autre, grâce au menu dans le coin opposé, déplaçant instantanément de temps le lieu qu’il regardait. Ces images étaient bien fixées, dans l’espace et dans le temps, accessibles grâce à la légère pression qu’il exerçait sur l’écran. La mélancolie de ces lieux qu’il ne pourrait jamais visiter l’habitait.

J’ai d’abord tenté d’ajouter à ce texte une partie théorique qui s’entremêlait avec la version précédente. Ce résultat nous a déplu et au final en devenait trop indigeste à la lecture. Ces premiers textes sont inspirés par les œuvres de science-fiction que je peux lire. Tout comme Robert Smithson, dans les textes qu’il à publié dans la revue Art Press par exemple, est inspiré par les premiers romans de JG Ballard ou les livres de Brian Aldiss. Je tente de mélanger anthropologie, philosophie des sciences, et esthétique pour créer une sorte de merveilleux inspiré par ces disciplines. En groupe, nos inspirations sont plastiques. Nous visitons régulièrement des expositions ensemble, cependant la plupart des impulsions théoriques viennent de mes lectures, que je digère et que j’incorpore dans les écrits qui nous représentent.

 

Ce premier texte donc, n’incorporant presque pas de registre réflexif, ne nous convenait pas, et j’ai cherché suite aux premiers retours qui m’ont été fait, d’intercaler des paragraphes théoriques, entre des parties de récit :

“Certains écrans brillaient encore pour un public absent. Leurs faibles couleurs se reflétaient et se mêlaient sur les surfaces alentour. Le spectacle qu’ils offraient n’avait plus que pour destination les insectes survivants. De longues pattes avaient poussé sur les petits circuits imprimés. Ils s’abritaient sous les pierres et se nourrissaient des restes d’acier. Les ombres chinoises qui se créaient alors ne faisaient plus fuir les animaux, habitués à cette vision. Ce qu’on nommait culture ne faisait plus qu’attirer les papillons encore habitués à rechercher les lumières dans la nuit. 

Que peuvent encore signifier ces lieux sans regard pour se porter dessus ? Sera-t-il même encore possible d’imaginer une signification qui ne soit pas humaine ? Une esthétique qui pense la forme des environnements au travers des signes qu’émettent et reçoivent toute formes de vie ? Le vivant fait sens du monde qu’il capte. Le milieu où évoluent insectes, arbres, roches, rivières et terre, crée des écosystèmes en mutation perpétuelle. De cette biosphère, naît aussi un imaginaire qui alimente notre travail, nous tentons de rendre sensibles ces mondes dans lesquels nous nous projetons. Les fictions sont notre fond qui permettent à nos formes d’apparaître.

L’entropie émiettait petit à petit chacune des structures qui composaient l’espace, et le temps était maintenant seul sculpteur de formes autrefois intentionnelles. Les câbles s’étaient entourés de mousse et la sève semblait circuler jusque dans la dalle de cristaux liquides, permettant leurs animations. Les informations circulaient électroniquement ou biologiquement. La toile qui recouvrait le monde avait désormais pris une forme nouvelle.”

 

Cette seconde version nous plaisait, toutefois elle ne faisait pas assez écho aux œuvres. De plus, elle était devenue indigeste, le lien entre l’histoire et les réflexions était moins clair. La voie intermédiaire, entre théorie et littérature, entre recherche et fiction, était ici mal réalisée. Dans notre travail de groupe, nous voulons donner des clefs de lectures au spectateur, que ce soit par l’ajout de l’écrit qui intègre les expositions, comme avec les œuvres qui peuvent être plus figuratives. C’est en tentant de répondre à ces différentes envies que je suis finalement arrivé au texte final.

Récemment, je me suis rendu compte que ce n’était ni des fictions à part entière, ni des textes théoriques que j’écrivais. Ce type de texte est montré comme la parole du collectif. En parlant au nom du groupe, ils deviennent des écrits d’artistes. Ils possèdent ce statut entre le texte utile qui présente et explicite une démarche, mais aussi une dimension formelle, avec une manière d’écrire plus libre et ouverte comparativement au registre uniquement théorique. C’est aussi par rapport à ces problématiques d’écriture, que je ne cite jamais de nom d’auteur ou de livre, bien que mon texte fasse des emprunts explicites à certains concepts. Pour n’en développer qu’un qui me semble important, dans le texte final, l’idée de monde propre est ainsi une traduction du concept d’Umwelt développé par Jacob Von Uexkull, tel que j’ai pu le découvrir dans le livre de Tim Ingold, Marcher Avec les Dragons. Citées avec le nom des auteurs, ou en note de bas de pages, il me semble que les références feraient obstacle à la compréhension et à l’immersion. Mes lectures sont donc inclues dans mes écrits pour qui connaît ces références, à la manière d’une œuvre d’art qui peut citer d’autres œuvres visuelles, pour qui les reconnait. Les citations intègrent un univers que nous développons pour leur force suggestive. 

DAY DREAM, Antonin Dony, 2022. Photo:  Pauline Montagne

Le texte accompagnait les onze œuvres de l’exposition. Bien que l’on puisse compter chaque œuvre et que nous sachions à qui appartient chaque pièce, notre méthode de travail en commun cherche à créer un ensemble qui fasse corps. Nous pensons avec l’entièreté du lieu et de l’installation plutôt que de créer une juxtaposition entre chacune d’elles. Je n’en décrirai ici que trois pour permettre de mieux saisir les enjeux qui traversent nos expositions. Une première œuvre qui me semble représenter nos réflexions se nomme Hedgehog créée par Arsène Prat : une sorte de croix de métal qui supporte 6 écrans, de format 4/3, à chacune de ses extrémités. Celle-ci est posée sur un tas de sable. Elle diffuse une même vidéo à la limite de l’abstraction dans chacun des écrans. On retrouve une qualité d’image dégradée faite de bruit numérique. Sur une cimaise adjacente, on retrouve une seconde installation d’Eve Martin, qui suspend des téléphones portables à leurs câbles d’alimentation. Ils diffusent de courtes boucles vidéos, comme des souvenirs qu’ils contiennent. Les câbles grimpent ensemble sur la cimaise et se séparent sur le plafond, avant de pendre devant les spectateurs à différents niveaux. Ce système électrique rappelle un lierre grimpant ou encore une sorte d’arbre schématisé. Une dernière œuvre d’Antonin Dony, intitulée Day Dream, se trouve au fond de la galerie. Elle consiste en une colonne de béton, qui accueille une petite plante. Cette dernière se tourne vers trois écrans qui la surplombent et diffusent une vidéo d’un soleil radieux. 

Le texte est venu prendre part à notre création générale, pour devenir une œuvre. Bien qu’il ait été d’abord rédigé pour la publication qui a accompagné l’exposition, nous avons cherché ensemble à l’intégrer dans le reste de l’exposition. Dès notre première collaboration, nous avons tenté de penser le texte comme une pièce, au même statut que les autres œuvres. Cette démarche a été aussi soutenue par mon travail graphique, qui me permet de penser aussi l’écrit avec une destination et une mise en forme. Les mots sont mis en écran ou projetés. Dans Présences Futures, nous avons fait le choix de trois paragraphes, comme des chapitres qui ont jalonné l’exposition du début à la fin du parcours, et toujours aux côtés d’une autre œuvre. Les choix typographiques rappellent l’imprimé et sont inspirés par le livre en tant qu’objet graphique. Tout comme je n’écris pas sur le collectif, mais avec eux, le texte ne surimpose pas l’exposition mais en fait intégralement partie.  

Les œuvres sont réalisées indépendamment, pourtant elles sont importantes dans un ensemble. Nous avons aussi œuvré à une cohérence globale. C’est pourquoi le travail de l’éclairage a occupé une part importante de notre travail. Nous avons travaillé à l’aide de gélatines colorées pour accentuer, faire varier et choisir sciemment l’ambiance générale dans l’espace d’exposition. Nous avons aussi fait appel à un couple d’amis sound-designers, Théo Serror et Jeanne Laborde, qui collaborent régulièrement avec nous. Ils ont créé dans le lieu une bande son pour l’exposition. Spatialisé dans l’espace, composé de différentes boucles enregistrées sur place, afin de proposer une ambiance sonore in-situ et qui fait écho à la galerie et notre manière de travailler.

PRÉSENCES FUTURES, Capsule Collectif, Vue d’exposition. Photo : Blaise Adilon

De par ces différents choix, nous créons une sorte de décor. Nous avons une approche que l’on pourrait qualifier de cinématographique. Nous créons grâce aux différents éléments un contexte qui immerge le visiteur dans une projection. Ainsi, le texte met des mots sur cette histoire que nous imaginons tandis que les œuvres racontent aussi le futur que nous imaginons. Dans ce bâtiment historique, le contraste entre les anciennes voûtes et nos pièces a permis de révéler de nouvelles qualités à nos œuvres. L’aspect temporel de ce que nous proposons s’est accentué. 

Cette exposition a été pour notre collectif une sorte de bilan des deux dernières années de production commune. Par exemple, des œuvres de notre première collaboration au 6b ont été présentées ici. Nous avons surtout travaillé à l’implémentation de solutions techniques viables, pour une présentation sur un temps de monstration plus long. Nous avons uniformisé les écrans sur certaines œuvres, remplacé les lecteurs vidéos, ou encore amélioré certaines pièces. Notre discours s’est aussi affiné, et les directions que nous avons développées sont maintenant plus claires et affirmées. 

L’absence d’humain ne signifie pas dans nos présentations l’absence de vivant. Ce regard où nous cherchons des formes d’hybridation entre des formes biologiques ou géologiques et nos objets technologiques atteint, il me semble ici, une sorte de maturité. Les suites pour nous seraient de poursuivre la recherche de ce regard sur le vivant au-delà de l’être humain. La présence des textes, ou d’œuvres qui implique des objets qui semblent prendre leur indépendance, lie encore à ce qui sont des formes actuelles. Comment si nous poussions cette recherche pourrait s’exprimer ce regard ? Réfléchir à la temporalité de la géologie, essayer de traduire les signaux que reçoivent et transmettent des plantes, ou encore la perception de l’écriture hachée par nos terminaux, pourrait être autant de questions à poursuivre dans nos recherches esthétiques. 

Nous avons aussi appris, avec cette exposition, ainsi que dans les deux années passées à œuvrer en commun, à travailler ensemble. Nous répartissons le travail, pensons ensemble. Nous sommes assez certains de nos qualités et de nos savoir-faire, et étendre notre collectif à de nouvelles collaborations, comme nous l’avons fait ici avec la partie sonore de l’exposition, est aussi une piste qui nous permettrait de faire évoluer notre travail. Nous réfléchissons à des collaborations par exemple avec des danseurs ou des performeurs, nous cherchons aussi à réaliser des projets d’installation pérennes dans l’espace public avec des architectes. C’est dans le collectif que se trouve une part de notre inspiration, et aussi en faisant évoluer celui-ci que nous pourrons faire évoluer notre travail. 

PRESENCES FUTURES, Vue d’exposition, 2022. Photo : Pauline Montagne