Introduction améliorée de mon mémoire de recherche-création

Un titre…

 

Reseet. 

 

Reseet les hommes 

Je dois trouver un titre pour présenter le projet dans un dossier de demande de subventions. Je dois trouver un titre. Cela fait plusieurs semaines que ce titre – ce mot – me reste en tête. A vrai dire, je n’ai même pas d’autres idées. Comme s’il s’imposait.

Reseet, c’est un bouton sur de nombreux appareils. C’est une fonction aussi. Une action qui permet de redémarrer. Tenter de supprimer les bugs qui nous posent problème.

C’est concret. Palpable. Utile.

Facile.

Le plateau {de théâtre} est peut-être l’un des rares lieux pour faire cette expérience sur les êtres humains. Au moins dans la dimension fictive, c’est-à-dire avec un personnage que l’on peut sculpter, accompagner, crash-tester, car il est beaucoup plus difficile de (se) reprogrammer, le facteur humain étant souvent imprévisible et résistant.

Cette petite pièce que je propose est une tentative de réinitialiser l’être humain originel, celui avant le genre, peut-être celui avant le sexe. De la sortie de l’utérus à la maîtrise tranchante des mots, en passant par l’incorporation, tâtonnante, d’une virilité prédatrice.

Pourquoi vouloir Reseet les hommes ? Je crois que nous vivons dans cette période de regain du féminisme, notamment depuis le #metoo et #balancetonporc sur le réseau social Twitter en 2017. L’ampleur est telle que, presque 6 ans après, il y a régulièrement des femmes en France qui dénoncent leurs agresseurs et l’omerta, mais aussi la complicité dans leur milieu professionnel : YouTube (#balancetonyoutuber), le monde du cinéma #Metoocinema), le monde du sport, le milieu journalistique (#balancetaredac), le cercle familial (#metooinceste), le milieu gay (#metoogay), l’institution Sciences-Politique (#sciencesporcs), le théâtre (#metoothéâtre), et le monde politique (#metoopolitique) 

 

Depuis, l’image l’harceleur et/ou agresseur sexuel a changé. À travers ces multiples prises de paroles, dans des milieux différents les uns des autres, l’idée de l’agresseur sexuel solitaire, associable, agissant la nuit, etc. s’effondre en partie. 

Alors, qu’en est-il de ces hommes qui, dans la rue, les transports, les supermarchés, les chats Twitch, les messages privés sur Instagram, harcèlent sexuellement les femmes ?

L’expression “harcèlement de rue” est habituellement employée pour désigner des comportements et des interactions à connotation sexuelle de la part d’hommes envers des femmes dans des lieux de passage, où des inconnu·es se croisent. Le mot “harcèlement” renvoie au fait que ce type de comportement se produit à plusieurs reprises. (3) Cette répétition peut-être le fait d’un individu (d’un harceleur de rue) ou de différents hommes à des moments distincts, ce qui constitue ici, par accumulation, un harcèlement sexuel commis par des personnes provenant du groupe social des hommes. Le caractère genré du harcèlement de rue est indéniable : les femmes ne harcèlent pas sexuellement des inconnus dans les espaces publics. 

Pour comprendre l’ampleur de ce phénomène, une étude de mars 2015 réalisée par le Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes constate que “100 % des utilisatrices de transports en commun ont été victimes au moins une fois dans leur vie de harcèlement sexiste ou agressions sexuelles {…} Les jeunes femmes sont particulièrement concernées. Dans 50% des cas, la 1ère agression intervient avant 18 ans”. (4) A contrario de ce chiffre significatif, nos pairs (parents, passants, etc.) et les institutions (école, police, entreprises de transports en commun, etc.) considèrent souvent le harcèlement de rue comme banal et non grave (5), voire rejetant la faute sur la tenue vestimentaire des femmes. Le caractère “banal” qui est attribué au harcèlement de rue provient à la fois des procédés employés comme siffler une femme, faire un commentaire sur son physique (un “compliment”), regard(s) insistant libidineux, présence opprimante (barrer le passage, etc), mais également de son amalgame avec la séduction (drague) (4), argument avec lequel certains auteurs d’harcèlement de rue se défende. On peut penser également que c’est à cause de sa forte occurrence dans la population féminine (4) que le harcèlement de rue devient quelque chose d’habituel. 

Malgré ce caractère apparemment inoffensif, la thèse du continuum des violence sexistes et sexuelles expose que les premiers faits de sexisme (mansplaining, manspreading, préjugés sexistes, etc.) sont à la base de faits sexistes de plus en plus graves allant jusqu’à l’agression sexuelle et au crime (1).  Les conséquences sur les femmes de l’omniprésence du harcèlement de rue sont connues : il engendre une “préparation psychologique et matérielle {…} pour ne pas être en situation d’être une cible” (4). C’est ainsi que la liberté d’aller et de venir des femmes en raison de leur genre diminue.  

C’est dans ce contexte que je me suis demandée où commence la violence masculine dans le processus de socialisation. Est-ce qu’elle s’imprime d’abord dans leur corps qui doivent répondre au mythe de la virilité ? Comment incorporent-ils la domination des femmes dans leurs attitudes et comportements ? Comment à l’heure de la fluidité des genres, est-il possible d’annihiler les rapports de forces entre les genres ? 

A partir de ce spectacle, au travers d’un personnage extra-terrestre qui empruntera plusieurs masculinités pour finir par adopter une masculinité prédatrice, on s’interrogera dans un premier temps sur les signes corporels masculins qui influencent les rapports de pouvoirs des hommes sur les femmes. 


Pour initier mon propos, vous trouverez ci-joint une liste (non-exhaustive) des Tik Tok témoignant du harcèlement de rue. 

https://docs.google.com/spreadsheets/d/1EeDBTXDnb9ORp6oOocAkod4cKLwFF_xE1BclgdAkKp0/edit?usp=sharing 

 

  1. La première salve de #Metoo datent de 2006, à l’initiative de Tarana Burke, militante afro-américaine. https://www.radiofrance.fr/franceinter/cinq-ans-de-metoo-en-france-les-10-hashtags-qui-ont-accompagne-le-mouvement-4606157

  2. Ibid. 

  3. http://www.stopharcelementderue.org/harcelement/  http://www.stopharcelementderue.org/harcelement/ %20https://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/IMG/pdf/hcefh_avis_harcelement_transports-20150410.pdf %20https://www.youtube.com/watch?v=6lCViYKoBwY  

  4. https://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/IMG/pdf/hcefh_avis_harcelement_transports-20150410.pdf 

  5. Coustere, C. (2014). Le harcèlement de rue dans une perspective de genre : significations, effets, solutions. {Mémoire non publié}. Institut d’études politiques de Toulouse. 

  6. https://docs.google.com/spreadsheets/d/1EeDBTXDnb9ORp6oOocAkod4cKLwFF_xE1BclgdAkKp0/edit?usp=sharing

 

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