Cosmotechnologies brésiliennes
Chère Cecilia : à la recherche d’un spectre
« Chère Cecilia » est un projet de recherche-création qui veut, à travers un parcours d’installations artistiques, matérialiser la mémoire d’une personne. Sur les traces de son passé, une femme essaie de retrouver son amie Cecilia, décédée il y a presque 20 ans. Un dialogue entre les deux femmes s’établit à travers différentes archives : mini-dvd, photographies, lettres manuscrites et dactylographiées. Dans la banalité de ces instants furtivement capturés, la poésie du quotidien s’installe entre la construction de la mémoire par les traces du passé et celles du présent. Dans cette multiplicité, l’artiste devient l’archiviste de sa mémoire et le dispositif artistique, le lieu où le spectre peut revenir et exister.
Donner vie à ses fantômes est un processus de reconstruction et d’archivage de la mémoire. La résignification du deuil est fondamentale pour la guérison. Mon hypothèse repose sur l’idée que la mémoire devrait être un processus collectif et social. Ainsi, le dispositif devient le lieu d’apparition non seulement d’un spectre – celui créé par l’artiste, mais aussi de ceux générés par le collectif.
La certitude de la mort est une expérience partagée par tous les êtres vivants. C’est pourquoi dans « Chère Cecilia » l’œuvre est conceptualisée comme ouverte, traversée et constituée par la présence et la possibilité de participation du public. De cette manière, il sera peut-être possible de procéder à une catharsis et à un exorcisme collectif de la douleur et du deuil, transfigurés ainsi par le partage. Est-ce possible que la confrontation ou la juxtaposition de ces différents spectres produisent de nouveaux événements, raisonnements et connexions ?
Un parcours de matérialisation de la mémoire
Ce projet propose une série d’installations. Le premier étant un film expérimental élargi : « Chère Cecilia », monté numériquement, filmé et projeté en super 8. Le film est composé de tous les fichiers – vidéos, photographies, lettres, blogs, réenregistrés dans ce support organique et périssable qu’est le film. « L’émulsion qui recouvre la pellicule est constituée d’une gélatine qui est par définition organique. C’est notamment cette composante gélatineuse qui cause la progressive détérioration de l’image, car comme toute chose organique, elle vieillit et se meurt. La pellicule est un objet vivant. » [1] Ainsi, la première installation devient également une représentation vivante et organique de cette mémoire, et également le premier spectre de Cecilia, car elle dialogue avec la matérialité du corps inséré dans le cycle écologique de la vie.
La deuxième installation « Memoria » est un logiciel « système expert »[2] développé pour l’occasion. Dans cette installation, les fichiers numérisés de cette mémoire seront disposés sur un écran tactile, formant un réseau de connexions synaptiques. Le spectateur est invité à interagir avec l’I.A. qui recrée de manière aléatoire de nouveaux films, ceux-ci étant d’autres versions du spectre.
La troisième installation est la construction collective d’une archive appelée « À la recherche du spectre », composée des films créés pendant ce parcours, archivés sur le web au fur et à mesure de la génération de nouveaux spectres de Cecilia.
Un voyage de matérialisation de la mémoire
Jusqu’à présent, mon projet s’est concentré, à partir d’une philosophie de la technique, sur la recherche conceptuelle d’un moyen de matérialiser le souvenir que nous avons de quelqu’un qui est parti. Ainsi, la mort a été considérée comme un destin inévitable, la fin vers laquelle tout être se dirige, ayant pour principal guide la certitude de la finitude. Jusqu’alors, le projet de recherche artistique se fondait sur une perspective d’un type de pensée occidentale européenne, qui ne laisse pas de place aux cosmologies et à la cohabitation de mondes différents.
Pourtant, d’autres mondes existent et sont possibles. Je me suis demandé quelles seraient les possibilités de représentation et de matérialisation de nos morts dans d’autres cultures qui ne sont pas centrées sur cette pensée euro-occidentale. Quels paradigmes seraient créés lorsque la mort n’est plus une finitude mais partie intégrante du cycle d’une collectivité ?
Au Brésil, à Bahia, les peuples originaires du Brésil et les descendants de la diaspora africaine, avec leurs cultures et leurs technologies ancestrales, résistent et existent dans une logique différente de la logique euro-centrique. Je cite la chercheuse Maria Luiza Tucci Carneiro : « Les traces laissées par un être humain sont multiples et colorées »[3]. Alors je me demande : quelles sont les traces laissées par mes ancêtres ? Comment mon histoire de vie en tant que femme brésilienne se lie à une histoire plus globale ? Par quelle trame les spectres de Cecilia et les miens se relient à cette toile cosmologique ? Peut-être est-ce à l’artiste-archiviste que revient la responsabilité de tisser des toiles, d’en défaire d’autres, de créer des significations, de nouvelles compréhensions, de nouveaux mondes.
La mémoire au sein de la rencontre entre Technologies et Cosmo Technologies
Que peut apporter la rencontre entre le rationalisme européen et la recherche transdisciplinaire brésilienne ? Dans les universités brésiliennes, de nombreuses recherches sont menées visant à maintenir vivantes et à valoriser les cultures, les rites et les expériences des peuples ancestraux. Ces derniers sont connus sous le nom de peuples indigènes, ou nations autochtones, présents sur le continent, avant l’arrivée des colonisateurs européens. À cela s’ajoute également les peuples de la diaspora africaine qui sont arrivés progressivement dans l’ancienne colonie portugaise, avec les débuts de la traite négrière.
Les arts, rites, objets et technologies de ces peuples ont toujours occupé la place de l’exotique dans les musées européens car ils ne correspondent pas à la logique rationnelle de l’Occident. Paula Barreto, artiste-chercheuse de l’Université Fédérale de Bahia (UFBA), lors de sa conférence intitulée « Ancestralité, Spectralité et Bonne Mort » [4], nous rappelle que la pensée occidentale, ainsi que la culture des musées, ont toujours associé l’ascendance de ces peuples aux primitifs, ceux-ci compris comme les moins développés. Paola Barreto souligne également que lors des processus de colonisation, les techniques modernes ont été implantées dans les pays colonisés en même temps que les traditions ancestrales étaient effacées.
Les techniques modernes et le progrès enlèvent toujours de la valeur à ce qui est ancien. Ainsi la dichotomie entre la nature et la technologie s’est instaurée menant le monde vers son effondrement. Alors, comment penser la technique en dehors de cette relation bidimensionnelle ? Comment créer de nouvelles relations entre les techniques ancestrales et modernes, sans présupposés hiérarchiques ? Comment mettre en valeur ces Cosmovisions pour que le progrès et les savoirs ancestraux ne soient plus opposés ?
C’est justement avec le rapport ‘non occidental’ à la mort pratiqué par ces différents peuples que le projet « Chère Cecilia » prétend tisser des liaisons. Les cultures ancestrales brésiliennes ne considèrent pas la mort comme la fin de l’existence d’un être, au contraire, elles existent en dehors de la dichotomie vie-mort. Pour ces communautés, la mort a une dimension de passage et de transformation, et ceux qui ont fait le voyage sont réintégrés dans la communauté d’une manière ou d’une autre. Alors, quels sont les liens qui unissent « Chère Cecilia » à ces traditions ? Je souhaite voir comment ces cosmologies peuvent être mises en relation avec les concepts de temporalité, compréhension de soi et technicité de ce projet de recherche-création. Peuvent-ils se lier dans une seule trame ?
Exu : Seigneur des croisements
De nombreuses connaissances ont été apportées au Brésil avec les peuples de la diaspora africaine, et dans ces connaissances, l’art et la technologie étaient complètement imbriqués par une techno poétique de la résistance, pour reprendre Paola Barreto[5]. Le candomblé est la religion initiatique créée au Brésil par les peuples africains arrivés dans la colonie. Ces différentes nations ont apporté avec eux leurs traditions ancestrales, leurs rites et leurs cultes qui se sont mêlés ici aux traditions des peuples autochtones et au christianisme. Ce syncrétisme représente la résistance et la permanence de ces cultures ancestrales. Dans le candomblé, les orixás sont des forces de la nature et leurs archétypes sont les manifestations de ces forces[6]. Exu est l’orixá de la communication, messager entre le ciel et la terre, seigneur des possibilités.
« C’est le monde de l’entre-deux, de la traversée, c’est le monde gardé et – si Exu a une maison – habité par Exu (orixá), porte-parole et interprète entre les humains et les divinités, le conducteur. [Exu commande et témoigne […] du premier acte de la manifestation de la matière (naissance) et du dernier acte de la décomposition de la matière (désincarnation, mort), c’est-à-dire de l’entre-deux des chemins, qui est aussi le chemin lui-même ; équilibre entre les limites qui banalisent cette action respective des réalités, les inter-réalités comme territoires de force ; croisement des éléments, des énergies et des pôles, c’est-à-dire des carrefours. » [7]
L’écrivaine brésilienne Bruna Beber dans son livre Une incarnation incarnée en moi. Cosmogonias encruzilhadas en Stella do Patrocínio apporte cette définition d’Exu comme celui qui n’a pas de maison, qui habite l’espace entre les lieux, se positionne au centre du carrefour indiquant les possibilités du chemin. De cette façon, Exu se manifeste à moi comme le carrefour de cette recherche, ouvrant des chemins et des possibilités, marquant ma nouvelle rencontre avec le Brésil et ses cosmologies.
Ainsi, depuis ce lieu, qui est aussi le mien, je commence à tisser ma toile en me reliant à cette ancestralité par une demande de permission d’entrer dans la cosmologie des peuples enchantés du Brésil. Tout en sachant que cette place que j’occupe est aussi un non-lieu, un espace entre les cultures, car n’étant plus de ma terre, je n’appartiens pas pour autant aux terres étrangères où je vis. Et justement, la force de cet Entre vient d’Exu, le seigneur des temps spiralés, habitant de la convergence des chemins. C’est lui qui guide la transformation de l’espace que j’occupe en mémoire, où passé et présent se rencontrent sur la trame de ces mouvements entre le Brésil et la France.
Rite de passage : Bain de feuilles[8]
Quand j’étais enfant, ma grand-mère, qui était catholique, me donnait des bains de feuilles et me bénissait. Parfois, il s’agissait de sept herbes sacrées, parfois de roses blanches. Au présent, avec mon corps présent, je répète le rituel pour me baigner et baigner mes filles, réactualisant ce passé qui est le mien, mais qui ici prend forme de mémoire collective et ancestrale.
Lorsque je fais macérer les feuilles dans l’eau je sens le parfum de plus en plus fort, j’entends le chant des oiseaux des promenades de mon enfance ainsi que le vent qui soufflait sur les arbres qui existaient encore à cette époque, les dernières forêts résistantes aux exploitations de café et de bétail de la région où je vivais avec ma grand-mère. Ainsi avec mes mains j’enchante l’eau, en invoquant les orixás, les fantômes du passé et du présent, ainsi que toutes les forces de la nature qui vont ensemble imprégner le mélange qui servira à purifier le corps physique et l’âme.
Ma voix hésitante déclame l’incantation :
De ce lieu qui n’est pas le mien
De ce lieu qui est le mien.
Ni d’ici, ni de là.
ENTRE-DEUX
Dans ce non-lieu que j’occupe
Corps marqué et pourtant sans trace
Je cherche ailleurs des racines et des feuilles pour me purifier.
Entre vents et tempêtes
Je traverse le chemin
Le chemin que je suis en train de parcourir est celui du changement de perspective de la recherche, en d’autres termes, c’est la transformation du temps linéaire dans lequel elle était installée vers un temps spiralé. Et je me suis inspirée de la notion de temps spiralé qui a été développé par la poétesse, dramaturge et chercheuse Leda Maria Martins dans son ouvrage Performances du temps spiralé où elle parle d’un temps-ancestralité qui diffère du temps-rationalisme, du temps-linéaire auquel nous sommes tous habitués.
“La notion d’un temps qui s’exprime par la successivité, par la substitution, par une direction dont l’horizon est le futur marque les théories occidentales du temps et l’idée de progrès et de raison propre à la modernité, même si le vécu et l’expérience individuels de la temporalité sont argumentés par de nombreux philosophes de l’Occident lui-même.” [9]
Leda nous raconte dans son ouvrage que le temps occidental est linéaire et nos corps et nos souvenirs sont inscrits dans cette ligne du temps, où nous remplaçons successivement les expériences passées par d’autres, ayant le présent presque comme un lieu illusoire, impossible à appréhender. Ce temps linéaire conduit les sociétés occidentales à une idée de la finitude de la vie. Et ainsi, nous naissons, nous nous développons et nous mourons, marquant de cette manière la fin d’un cycle. En même temps, les souvenirs de nos morts prennent la place du passé, de ce qui n’a plus de fonction dans la vie de tous les jours, dans nos gestes et mouvements quotidiens.
En revanche, le temps en spirale est celui qui vient briser la dichotomie du passé et du futur. Dans ses lignes courbes, le temps et la mémoire se reflètent et le corps actuel est cohabité avec les expériences des morts. Les vivants et les fantômes partagent le même espace social, dans une écologie de connaissances et de pratiques ancestrales. Ainsi, la mémoire devient vivante et s’incarne.
Fantômes, spectres et cosmologies
Bien que le projet « Chère Cecilia » ait été pensé au départ sur une logique occidentale, basée sur des concepts de la philosophie de la technique, il était aussi profondément lié à une cosmovision due à mes racines brésiliennes. Ce projet prétend une autre perspective du cycle de la vie dans laquelle nous pouvons vivre, mourir et revenir au groupe, matériellement et en spectre.
D’une part, il y a le corps spectral de Cecilia, ici représenté par un objet technique qui est le film en pellicule projeté et les films générés par I.A archivés sur le web. En même temps, ce corps est aussi l’être inorganique organisé de Bernard Stiegler[10] – ceux qui n’ont jamais été vivants, mais qui sont organisés comme du vivant. Ainsi, corps et spectre fonctionnent comme des concepts complémentaires aux visions cosmologiques et aux visions de la philosophie de la technique, où les installations sont à la fois la nouvelle matérialité de Cecilia et des objets totems, créées par moi pour faire revenir son spectre.
D’autre part, il y a les rêves, autre partie centrale de cette création, ici ils sont considérés comme lieux de prédilections pour les communications entre les morts et les vivants. C’est pourquoi je suis allée chercher les inspirations nécessaires pour réaliser le montage du premier film ainsi que la programmation de l’I.A du côté des « enchantés »[11] du cinéma expérimental américain, français et brésilien des années 50/60, comme Jonas Mekas, Maurice Lemaître et Helio Oiticica. Ils m’ont inspirée pour réaliser une écriture par couches, par superpositions et accumulations qui font allusion à l’univers onirique et expérimental.
Ainsi, dans une perspective cosmologique, Cecilia revient comme protagoniste et co-autrice de son retour car dans cette optique je ne suis plus la seule à concevoir l’œuvre, Cecilia existe par et à travers moi. C’est Nelson Goodman qui a dit que « …faire le monde consiste à séparer et à réunir, et souvent les deux ensemble…et faire des connexions. »[12] et j’ai bien l’intention de partir avec Cecilia vers cette recherche cosmologique pour y voir quels mondes nous attendent.
« Le passé n’est jamais terminé, le futur n’est pas défini. Le monde porte en lui les traces et les souvenirs de toutes ces époques. Le présent donne vie aux traces, et reconfigure ainsi l’avenir. Les nouveaux et les anciens sont réactualisés. L’effacement n’efface pas si on sait dénouer les nœuds et le vide fait place à l’occupation. »[13]
Pour conclure je me demande : de quelles manières pouvons-nous nous inspirer de ces traditions ancestrales brésiliennes dans la culture occidentale française ? Qu’est-ce que les peuples autochtones du Brésil ont-ils à nous apprendre ? Pouvons-nous tisser d’autres toiles, dans d’autres cultures, en donnant vie à nos morts, à nos enchantés ? Jusqu’à quel point pouvons-nous observer, apprendre sans incorporer ou juger ? Quelle est la mesure d’une recherche artistique vue et pratiquée par une personne entre deux cultures ? Comment pouvons-nous tous pratiquer les concepts cosmologiques de ces sociétés à partir de notre point de vue occidental et aussi de nos histoires privées ? Et surtout, qu’avons-nous, en tant que société, à apprendre de ces peuples ?
[1] Cavalier A. sur L’épiderme du cinéma : la pellicule. Sept et demi. 23 mai 2020.
[2] « Un système expert est un outil d’intelligence artificielle, capable de simuler le savoir-faire d’un expert humain dans un domaine précis, en exploitant des bases de données qui sont spécifiques à ce domaine, et en recourant à un moteur d’inférence pour simuler différents raisonnements déductifs. » Wikipédia.
[3] Maria Luiza Tucci Carneiro, Arquivos Relicários. (Crítica e coleção. SOUZA, Eneida Maria de et MIRANDA, Wander Melo). Belo Horizonte : Editora UFMG, 2011, p. 32-44.
[4] Paola Barreto, Ancestralidade, espectralidade e Boa Morte – notas para uma diáspora africana, Conférence donnée le 26.09.2022, à la Casa Preta HUB, Cachoeira, Bahia. Lien : https://youtu.be/WxTFAQljVHg
[5] Paola Barreto, Ancestralidade, espectralidade e Boa Morte – notas para uma diáspora africana, Conférence donnée le 26.09.2022, à la Casa Preta HUB, Cachoeira, Bahia. Lien : https://youtu.be/WxTFAQljVHg
[6] Lien : https://ocandomble.com/os-orixas/. Consulté le 30 septembre, 2022.
[7] Bruna Beber, Uma Encarnação Encarnada Em Mim : Cosmogonias Encruzilhadas Em Stella Do Patrocínio, Editora José Olympio, 2022. Pg.109 [Traduction libre]
[8] Lien pour la vidéo qui accompagne ce passage :
[9] Leda Maria Martins, Performances do tempo espiralar, poéticas do corpo-tela | Spiral Time Performances, Canvas-Body Poetics, Editora Cobogó, 2021, (« Encruzilhada »). p.25 [Traduction libre]
[10] Stiegler B., La technique et le temps : suivi de Le nouveau conflit des facultés et des fonctions dans l’Anthropocène, Réédition, Paris, Fayard, 2018, p.38.
[11] Les peuples autochtones brésiliens nomment leurs morts enchantés.
[12] Nelson Goodman et Marie-Dominique Popelard, Manières de faire des mondes, Folio, 2006, 240 p.23.
[13] Conférence du programme de post-graduation de l’EBA-UFBA : Processus autour de l’art indigène contemporain, organisé par la professeur Laura Castro, autour du sujet “THÉORIE ET TECHNIQUE DES PROCESSUS ARTISTIQUES” – le 25 août 2022, avec les professeurs invitées Marília Librandi-Rocha (BRAZIL LAB, Princeton University/USP) et Cynthia Cy Barra (UFSB)